Mois : novembre 2017

L’amer indien

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Je me souviens encore comment, jusqu’à jeune adulte, je regardais, goguenard, les amateurs d’emplumés comme je les appelais, portant fièrement t-shirts, boucle de ceinture, mocassins ou bracelet à l’effigie de « sauvages », des Indiens. Tout cela me paraissait bien risible pendant que je passais des heures à m’extasier devant les dernières technologies, la dernière paire de tennis ou la dernière raquette qui certainement aller me permettre de grappiller quelques points et gagner quelques matchs perdus bêtement par le passé. Chacun voit midi à sa porte, et pendant longtemps, je n’ai pas eu le recul, le discernement pour déroger ne serait-ce qu’un minima à cette règle.

Le temps a passé et si je n’avais plus l’immaturité de l’époque de ces moqueries, ma relation à la question amérindienne était tout au mieux neutre et pour ne pas dire presque totalement absente de mon quotidien. Certes, il y avait ce tableau estampillé Greenpeace chez mes parents que je voyais depuis mon enfance et traitant du discours tenu par le chef Seattle aux colons européens venant lui proposer d’acheter la terre sur laquelle il vivait. (voir la page à ce sujet en cliquant sur le lien ci-dessus). Je l’avais lu rapidement sur proposition de mon père sans que cela ne m’interpelle plus que ça, ne comprenant pas ou ne cherchant pas à approfondir le contenu du Message malgré une sorte de gêne comme si c’était moi l’homme blanc dont on parlait de manière peu flatteuse.

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La Vie m’a proposé patiemment ce sujet d’investigation un certain nombre de fois, au gré des déménagements de mes parents, d’une modification de la place de ce poster chez eux… Et puis il y a eu un jour de 2012 où les choses ont changé.

J’étais dans les Cévennes en train de participer à un stage autour de la Fleur de Vie et des travaux de Drunvalo Melchiziedek. Les activités du stage avaient aidé à ouvrir quelques portes en moi (j’ai chopé aussi quelques trucs moins sympas mais c’est une autre histoire, voir à ce sujet, les pages à propos du discernement et du new age* et l’article « chat loupé !« ) et un matin sous la douche avant d’aller prendre un temps « zazen » au dojo et commencer les activités du stage, j’eus l’impression d’un moment hors du temps, à la fois là sous l’eau qui coulait sur ma peau et en même temps ailleurs, accompagnant une femme habillée en indienne et cueillant des plantes et des baies. L’instant était magique, les couleurs d’un éclat particulier, les ressentis puissants comme l’odeur des plantes, de la Nature en général … un peu à la manière de ce que les accrocs à la technologie appelleraient « de la réalité augmentée ». La femme s’est levée d’un coup et « j’ai » vu quatre cavaliers arriver au loin. La terreur liée à ces cavaliers m’a pris au ventre et les images se sont effacées …

Même si je n’avais plus que la sensation physique de la douche, les impressions restaient vivaces. Je ressentais en moi la douleur, la colère, l’impuissance de ce peuple face à l’invasion subie et j’étais pris entre essayer de comprendre de qui venait d’arriver, la joie que cela soit arrivé, une sensation entre peur et colère dans mon ventre car mon esprit galopait à imaginer ce qui avait pu arriver aux personnages au regard de la terreur ressentie et l’heure d’aller pratiquer le temps de zazen. Cette dernière option offrait une occasion de se poser sur cet instant. Cela m’a permis de remémorer un livre acheté par mon plus jeune beau-frère, « Fantômes en marche » de Mary Summer Rain lors de son passage à la maison l’hiver précédent. Si, sur le moment, je n’avais eu qu’un intérêt limité, pris justement par les lectures qui m’avaient amené précisément là où je me trouvais, il était clair que j’allais m’y intéresser de plus près à mon retour des Cévennes !

L’occasion s’est présentée via la visite de mes beaux-parents à l’automne et le prêt par mon beau-frère de la série « Pluie d’été », quatre livres de Mary Summer Rain.

La lecture de ces livres a fait résonner quelque chose de très fort en moi, à propos du Respect, du lien à la Nature, à la Simplicité. Cela parlait de ce monde que je voyais sous mes yeux et de la perception que l’on pouvait en avoir, des changements qui s’opéraient aussi … C’était aussi sortir de la vision occidentale du monde dans laquelle je baignais quasiment exclusivement depuis ma naissance.

Au gré des pages qui s’égrainaient, je sentais une part enfouie très profondément en moi qui refaisait surface. Une affinité sans comparaison possible avec les terrains de tennis de mon adolescence. Avec le recul, j’y trouve une certaine similitude avec la quête de la vision dont parlent de nombreux récits et livres à propos de la sagesse amérindienne.

Cinq ans ont passé depuis cet instant et j’ai essayé de suivre la trace de mes mocassins même si les chemins humains ne connaissent que rarement la ligne droite. Les écrits de Kenneth Meadows, de Joseph Marshall III, de Marc Paget, de Russell Means, de Archie Fire Lame Deer, Tahca Ushte ont rejoint ceux de Mary Summer Rain, enrichissant ma perception du monde et lui donnant une joie au-delà des souffrances du quotidien. Une nouvelle connexion à la Vie. Plus encore, l’apprentissage du Lakota m’a montré une autre conception du monde, les vibrations des mots portant une sagesse que les mots eux-même ne peuvent retranscrire. L’occasion aussi de comprendre la symbolique de ce « rêve » éveillé sous la douche.

Passée l’amertume de ce qui est arrivé aux amérindiens d’Amérique du Nord et qui arrive encore tant au nord qu’au sud de ce continent, j’ai appris aussi qu’il n’était pas nécessaire de quitter une vie pour en embrasser une autre, qu’il n’y avait pas lieu de replacer un dogme par un autre et que la Vie était au-delà des dogmes. Il n’y a nul besoin de retourner en arrière, de changer de continent, de vivre dans un thipi … le Cœur sait, simplement, d’une connaissance silencieuse que l’on peut apprendre à cultiver pour se laisser guider par l’Esprit.

Le message transmis par les amérindiens m’a aussi permis de retrouver la trace de la sagesse de la Terre qui me porte et des enseignements cathares et j’ai pu voir et comprendre à quel point, au delà des océans, le murmure du vent portait la même sagesse de Vie. Comme le titre Russell Means : « Si vous avez oublié le nom des nuages, vous avez perdu votre chemin… » , quelques mots poétiques qui peuvent nous amener bien au-delà de ce que l’on avait imaginer !

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    écrit en écoutant Wahancanka – Joseph Shields Jr , Sanctuary et Earth SpiritCarlos Nakaï